Une nouvelle enquête du Supplément Enragé sur le processus scientifique de la cryogénisation et son usage par les scientifiques.
par Chloé Le Blay
Il espérait pouvoir être “réveillé” quand les progrès médicaux auraient été capables de guérir la maladie qui l’a emporté. En 1967, le professeur James Bedford décède des suites d’un cancer incurable. Son corps ne se trouve ni sous terre ni devenu poussière, mais attend patiemment dans une cuve en suspension, tel est le terme employé pour évoquer les personnes cryogénisées. La cryogénisation est un procédé qui consiste à préserver les corps des personnes décédées grâce au froid, dans l’espoir de les faire revenir un jour. La Nasa travaillerait elle-même sur des pistes similaires pour les voyages sur Mars, mais ça, c’est une autre histoire.
« Un retour grâce à la science du futur »
Imaginez un monde libre de maladie, mort et vieillissement
Tel est le slogan de Cryonics Institute, l’un des trois centres spécialisés dans la cryogénisation. Le saint Graal : “étendre la durée de vie humaine en préservant le corps en utilisant les technologies cryogéniques existantes – avec pour objectif d’un retour grâce à la science du futur”.
Le créateur de l’Institut, Robert Ettinger, est l’un des précurseurs de la cryogénisation. Il en pose les premiers fondements en 1962 avec son ouvrage The Prospect of Immortality. Aujourd’hui, Cryonics Institute se targue sur son site d’avoir sans ses rangs plus de 1 000 membres dans des dizaines de pays, incluant 117 patients cryoconservés dans l’établissement du Michigan. Outre Cryonics Institute, deux autres entreprises proposent ces services, toujours aux Etats-Unis : il s’agit de Alcor LEF et de la Cryonics Society of California.
Une partie de la théorie de la cryonie repose sur le concept de mort informationnelle, qui se différencie de la mort clinique et la mort légale. La mort informationnelle se définit comme la fin de l’ensemble des informations constituant un individu. Selon les adeptes de la cryogénisation, il est possible de faire revivre une personne tant qu’elle n’est pas advenue.
Comment se déroule une cryogénisation ?
Ce processus advient une fois le décès prononcé par un médecin. Le corps doit alors être préparé rapidement pour le transport jusqu’à un centre de cryogénisation.
La circulation sanguine et la ventilation des poumons doivent impérativement être maintenues pour conserver la viabilité du cerveau. Puis, une solution de préservation est injectée dans le sang, le remplaçant par une sorte d’antigel pour éviter sa coagulation. Le corps est ensuite progressivement refroidi jusqu’à -196° C et est plongé la tête en bas, dans une cuve de conservation d’azote liquide, d’une température de -196°C également. Les corps, que les spécialistes préfèrent désigner par le mot “patients”, peuvent y être conservés pendant des siècles.
Un procédé flou et mis de côté par la loi française
Pas de garantie de succès, beaucoup d’espoir et d’argent dépensé. “L’offre commerciale est uniquement basée sur l’espoir d’un futur où la technologie et la médecine auront fait des progrès suffisants pour « ranimer » les corps. D’ailleurs les trois sociétés de cryogénisation l’assument. Sur son site Web, Alcor affirme que le procédé a ainsi « de bonnes chances de fonctionner » tout en soulignant les limites.” explique un article de L’Express publié en 2016.
Au même titre qu’un traitement expérimental, rien ne garantit que ce procédé fonctionnera et j’aimerais rappeler que les candidats à la cryogénisation en sont bien conscients lors de la signature
Stéphane Beauregard, l’un des directeurs de Cryonics Institute, toujours à L’Express.
Est-il possible de se faire cryogéniser en France ?
Bien que la loi du 15 novembre 1887 donne le droit à chacun d’organiser comme il le souhaite ses propres funérailles, seules l’inhumation, l’incinération ou le don du corps à la science sont autorisés. La cryogénisation est interdite, notamment depuis l’affaire du docteur Martinot dans les années 1980. Ce médecin avait congelé le corps de sa compagne puis l’avait placé dans un caisson réfrigéré à -80 °C, conçu sur mesure et installé dans sa propriété.
“La question, qui avait fait grand débat à l’époque, était de savoir si la cryogénisation était un mode de sépulture légal ou illégal, sachant que la liberté des personnes de choisir leur mode de sépulture est protégée par l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme (liberté de pensée). Au terme de nombreuses péripéties judiciaires, la validité juridique du procédé avait été définitivement contestée par le Conseil d’État.
Ouest-France
Il est pour autant possible de se faire cryogéniser en se rendant aux États-Unis et sans opposition de la part de sa famille. « Des francais(e)s » sont d’ailleurs inscrits sur les listes de Cryonics Institute, confie son président à L’Express.
75 000 euros pour la tête, 188 000 pour le corps entier, telle est la somme à débourser si vous souhaitez vous faire cryogéniser chez Alcor. Cryonics Institute propose, quant à lui, des prix plus attractifs : entre 26 000 et 33 000 euros et ne propose que des offres pour le corps entier. De quoi refroidir soudainement toute envie d’y avoir recours.
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